jeudi, novembre 03, 2005

Les fascistes : c'est ceux qui disent qu'y sont

Il faudra un jour que le vulgaire se fasse à l'idée que les mots ont une signification propre.

Par exemple : le mot « fasciste ». Il est devenu désepérément vulgaire, et a désormais pour signification « trop autoritaire », avec une petite nuance d' « agressivité ». Le fascisme n'a plus rien à voir avec le nationalisme, le culte du chef, etc.

Non, « fasciste » est juste devenu une sorte d'insulte. Sont donc vulgairement fascistes le gardien d'immeuble qui tance les bruyants ou le professeur qui réclame le calme.

À noter que si le vulgaire veut marquer sa désapprobation totale, il utilisera de préférence « nazi », qui rajoute parfois un peu de racisme mais est surtout la version forte de « fasciste ». Par exemple, le professeur qui en plus donne une punition passe immédiatement de fasciste à nazi.

L'appauvrissement de ces deux termes me désole ; déjà, parce que les gens ne savent plus de quoi ils parlent - les étudiants de fac (donc censément pas les plus illettrés de la population) qui refont le monde parlent de « régime fasciste » à la place de « dictature », par exemple.

Ensuite, parce que si je ne suis pas un farouche défenseur du devoir de mémoire à tout prix, il me semble de bon aloi de laisser le nauséabond à sa juste place, et de n'y faire référence que dans des situations idoines. Or si « fasciste » ou « nazi » deviennent des insultes courantes, ou pire encore juste des termes galvaudés, tout d'un coup les flammes brunâtres deviennent quelque chose de vulgaire, donc d'acceptable, pour toute une partie de la population. Et ça, j'aimerais autant que possible l'éviter !

8 commentaires:

Anonyme a dit…

Si le français de la rue évolue, c'est parce que c'encore une langue vivante!

Soyez donc philosophe, et demandez vous plutôt pourquoi l'élève se révolte contre son prof, plutôt que de vous braquer sur le choix d’un mot inapproprié.

Baygon Jaune a dit…

Je n'ai rien contre l'évolution de la langue ; j'ai contre l'appauvrissement. Qu'un mot voit son sens altéré, cela me convient. Qu'un mot prenne complètement la place d'un autre (en gommant donc les différences), qui lui disparait, je trouve cela dommage, et même dans le cas présent, comme je l'ai déjà dit : dangereux.
Sinon, « la révolte contre le prof », c'est à peu près toujours une connerie d'élève (et je ne suis pas professeur, et j'étais encore élève il y a peu). Je reviendrais d'ailleurs dessus à l'occasion.

Anonyme a dit…

Oh que j'adore ce genre de discussions !
Tout d'bord, je me permets de faire de l'auto-promotion, relative à une note que j'ai commise il y a deux mois déjà qui traitait plus ou moins du sujet :

http://reac-de-gauche.blog.lemonde.fr/reacdegauche/2005/09/logohrre_inflat.html#comments

Oui, marre de ces superlatifs, de cette inflation dans les insultes, de cette logohrrée de mots pris en dehors de leur sens, même de leur contexte.

Traiter un adulte qui fait preuve d'autorité de fasciste ou de nazi, c'est commettre une insulte. Envers lui (mais ce n'est pas le plus grave), et envers les dizaines de millions de victimes de ces idéologies mortifères - dont 7 à 8 millions passés par des cheminés. Un fasciste ou un nazi, ça déporte, ça torture, ça exile, ça gaze, ça pend, ça assassine, ça fout les dépouilles dans des crématoires. Voilà ce que les mots veulent dire !
Ah oui, aussi, marre de cette flagellation de l'adulte par rapport aux jeunes". Il faut toujours se demander pourquoi "ils se révoltent, ces pauvres chéris..." Quand entend on quelqu'un suggérer à un ado de réfléchir aux motifs d'exaspération des adultes référents?

Anonyme a dit…

Cher réac, nous vous êtes vous jamais révolté étant jeune. Moi je me révolte encore aujourd’hui. Si une personne vous traite de Nazi, c’est que soit elle n’a aucune idée de ce que cela signifie, ou bien elle veut vous provoquer. C’est sur qu’elle ne vous accuse pas d’avoir gazé les juifs et les gitans. Ce n’est que de la provocation pure et simple. La provocation est toujours en réponse à un comportement égoïste, dédaigneux, intolérant ou trop autoritaire.
Traiter qqn de Nazi peut mener à une forme de négationnisme.

Anonyme a dit…

... j’ai posté trop tôt. Voici la suite:

Traiter qqn de Nazi peut mener à une forme de négationnisme. Cela me révolte et c'est là qu'il y a un réel danger et non pas dans l’appauvrissement de la langue. Lol!

Anonyme a dit…

A placer ce billet, auquel je souscris complètement, dans le contexte des violences actuelles en France et les mots employés dans les media, leur perte complète de sens: "résistant irakien", "jeunes", "poseur de bombe" et non "terroriste" à la BBC après le 7 juillet, "incivilités"...

Tout cela entraîne le nihilisme: chacun est le fasciste d'un autre, tous les mots, mêmes les plus graves, se valent, et ben laden=bush=hitler.

Anonyme a dit…

Ca ne me gene pas trop que l'on compare Ben Laden à Hitler, puisqu'ils sont tous les deux animés par la haine de l'autre.

Ca me gêne davantage quand on compare un professeur qui fait son travail - à savoir faire preuve de rigueur professionnele (ce qui n'est pas antinomique avec l'affection) pour le bien de ses élèves à qui il doit inculquer des rudiments de sa matière, ainsi qu'une forme de socialisation puisque les parents démissionnent.

Et quand un petit con agresse quelqu'un, quel que soit ce quelqu'un, il est bon, dans son propre intérêt, qu'il perçoive très vite les limites à ne pas dépasser, et qu'il y a des choses inadmissibles.

Moi, je le lui fais sentir avec des mots. S'il retient la leçon, cela lui évitera peut être un coup de couteau.

PERSONNE NE ME TRAITERA DE FASCISTE OU DE NAZI SANS QUE JE REAGISSE ENERGIQUEMENT (même un "jeune" qui "ne sait pas" ce que ça veut dire). JE N'AI PAS DE GRAND PERE A CAUSE DES NAZIS.

Et bien sûr, que je me suis révolté étant adolescent. j'ai même fait des "petites choses" dont je ne suis toujours pas très fier.

Seulement j'ai eu la chance d'avoir des gens qui m'ont fixé des limites. Pas des démagos d'jeunistes qui m'ont laissé m'enfoncer. C'est pourquoi, au final, je suis assez content de ma vie. Grâce à eux. Je les remercie, et je les aime pour cela.

L'adolescence, c'est le passage dans le monde des adultes. C'est le moment des transgressions. Il faut savoir à ce moment faire un choix, et pour cela, il faut être guidé (ce qui n'empêche pas le libre arbitre)

Anonyme a dit…

Oui, mais c'est bien compréhensible. Les intellectuels
français semblent toujours à l'affût de la plus petite déviance
idéologique. Ils se dressent au
moindre commencement de soupçon de
propos potentiellement fascisant, staliniste etc dans les
discours ambiants. Pas étonnant que
nos étudiants (voire plus) soient
enclin à utiliser ces termes.