vendredi, mars 31, 2006

Science et croyance

En préambule, je me positionne : je suis fermement athée (et passablement anti-cléricaliste), et j'aime à penser que je suis un scientifique - je peux au moins affirmer que c'est mon métier.

Cependant, une chose m'agace profondément : c'est que certaines personnes (vulgairement athées) opposent vivement science et croyance, portant la science aux nues et trainant la croyance aux gémonies.

Déjà, même si l'Académie française donne au mot « croyant » la signification de « qui croit ce que sa religion enseigne, qui croit en Dieu », il est incontestable que l'athéisme est une forme de croyance - puisque c'est croire en la non existence de Dieu. C'est souvent difficile à faire admettre aux athées scientifiques « anti-croyances », tant ils sont bornés, figés dans leur attitude, engoncés dans leurs certitudes qui plus est adoptées sans réelle réflexion, la plupart du temps par anti-cléricalisme bêlant.

Par ailleurs, si la science se veut exacte, rappelons qu'il ne s'agit que d'un outil prédictif ; et qui plus est, que l'usage de la science requiert une dose de croyance non négligeable ! Croyance dans les faits expérimentaux par d'autres réalisés, croyance dans la bonne tenue des appareils certifiés l'être, croyance enfin et surtout dans la continuité des lois physiques. Évidemment, sans cette dernière croyance en particulier, pas de science possible : à quoi bon faire des expériences, réaliser des modèles, en tirer des prédictions si l'on pense que demain tout sera changé ?

Certes, il y a des croyances plus ou moins crédibles, plus ou moins intuitives. On peut à foison discuter de ce qui est le plus économique en hypothèses et du rasoir d'Occam : in fine, on en revient quand même à des croyances. Et il m'apparait aussi vain et grossier de discuter les croyances des autres que de leurs goûts, du moment bien sûr que lesdites croyances ne sont pas le socle d'actions nuisibles.

8 commentaires:

Anonyme a dit…

Ainsi l'absence de croyance serait une croyance ?

Drôle de théorie qui voudrait que ne croire que ce qui a été démontré puisse être une croyance quelconque.

Être athée, selon l'étymologie du terme, ça signifie ne pas avoir de dieu, ne pas croire qu'un dieu existe. Rien de plus.

Ca ne signifie pas être persuadé qu'il est impossible qu'un dieu existe - ce qui serait une forme de croyance.
Ca ne signifie pas non plus être dans l'attente - ce qui serait de l'agnosticisme.

Si certains veulent se persuader que l'attitude qui consiste à ne pas croire ce qui n'a pas été démontré équivaut à croire ce qui n'a pas été démontré, on ne peut pas franchement dire que c'est très logique.

Si votre pratique scientifique est croyance, alors justement elle ne l'est plus, elle n'est plus science. La foi, ce n'est pas présumer une chose en se disant qu'on peut se tromper ; c'est être persuadé d'une chose qu'on ne peut vérifier. Je doute qu'un théologien me contredise sur ce point ; et je vous prie de croire que j'en connais, croire en ma bonne foi.
Ca n'a donc pas grand chose à voir avec le fait de supposer qu'une expérience fut correctement réalisée par un homologue.

Aussi, la science n'est pas censé être un art divinatoire. En ce sens, évidemment, si on se dit que demain matin une guerre nucléaire va peut-être raser la planète, il parait certain que la recherche paraît un peu futile.
Mais quoi qu'il en soit, si la continuité des lois physiques devait être brisée, ces lois n'en deviendraient pas subitement fausses, puisqu'elles étaient correctes pour notre présent, elles deviendraient juste dépassées, en fonction de paramètres nouveaux à prendre en considération avec des méthodes scientifiques.

Il me parait donc pas du tout problématique de s'interroger sur toutes formes de croyance. C'est un cheminement philosophique.

Il est évidemment vain de se servir de la science pour accuser de tromperie ceux qui se placent du coté de la foi. Tout comme cela peut sembler approprié pour inciter au recul vis à vis de ceux qui prétendent qu'un texte sain contient l'unique verité de l'aventure humaine.

Rappelons aussi qu'il est niais de croire qu'un scientifique ne peut-être qu'athée - on peut faire un catalogue infini de scientifiques reconnus qui n'étaient pas athées pour un sou (sans même évoquer les périodes où la plupart des savants étaient hommes de religion).

Anonyme a dit…

Que de mépris en si peu de lignes et quel manque de mesure...

Et que de mélanges ! La croyance du scientifique en un résultat ne me semble pas entretenir grand rapport avec celle que l'on peut avoir en Dieu (ou autre entité de cet ordre).

Tout ceci pour dire quoi ? Que science et foi ne sont pas inconciliables ? C'est enfoncer une porte ouverte que, d'ailleurs, d'autres on entrebaîllé avec plus de tact et de façon plus convaincante.

Mais passons...

Ah, si, quand même, on voue - et non traîne - aux gémonies...

Baygon Jaune a dit…

Je vous encourage tous deux à aller consulter un dictionnaire.

Marcel :
(1)ATHÉE n. XVIe siècle. Emprunté, par l'intermédiaire du latin chrétien atheos, « qui ne croit pas en Dieu », du grec atheos, « qui ne croit pas aux dieux ».
Personne qui nie l'existence de toute divinité. C'est un athée. Elle passe pour une athée. Adjt. Un siècle athée. Humanisme athée. Matérialisme athée.

Il y a trois réponses possibles à la question de l'existance d'une entité supérieure : oui (croyant), non (athée) ou peut-être (agnostique). Être athée, c'est donc bien croire à la non-existence de Dieu. « Ne pas croire en Dieu, sans plus » relève de l'agnostisme - soit dit en passant, je considère avec la plus grande suspicion les agnostiques ; ce « peut-être » me semble irrecevable comme réponse intrinsèque.
Et croire en la non-existance de Dieu, c'est bien une croyance, à moins que vous ne veniez m'en apporter une preuve.

Au courageux anonyme :
Libre à vous de ne pas voir ce que deux croyances ont en commun. Il s'agit dans tous les cas d'un acte de foi, d'une volonté engagée ; et je vous encourage à faire un tour dans les labos pour vous apercevoir de ce que si la majorité admet qu'on puisse être scientifique et croyant, elle a aussi tendance à penser que la non-croyance est supérieure à la croyance, selon une représentation tordue du rasoir d'Ockham.

Et en passant :
(1)GÉMONIES n. f. pl. XVIe siècle. Emprunté du latin gemoniae (scalae), « (escalier) des gémissements », dérivé de gemere, « gémir ».
ANTIQ. ROM. Lieu où l'on exposait les corps des criminels après l'exécution, avant de les jeter dans le Tibre. Son cadavre fut traîné aux gémonies. Expr. fig. Traîner, vouer quelqu'un aux gémonies, l'accabler publiquement d'outrages.

Quand on prétend donner des leçons de vocabulaire, la moindre des choses c'est de renseigner avant.

Anonyme a dit…

Courage, Baygon Jaune, et continuez!

Parler de croyances - ou de non croyance - c'est "se faire vouer aux gémonies", inévitablement, et c'est aussi voir à quel point les dipthères peuvent se faire sodomiser sauvagement.

Quant à l'athéisme militant, il me gonfle enore plus, moi qui me définis comme agnostique, que les ratociniations des curaillons de tout bord, c'est dire!

Anonyme a dit…

Mais précisément cher ami, je vérifie. Le Littré (édition papier) vous le confirmerait: on voue aux gémonies lorsqu'il s'agit du figuré, plus précisément lorsque l’on maudit et l'on traînait au sens propre. Cette dernière forme n'est plus guère usitée et si elle subsiste de façon marginale, c'est davantage pour désigner une action physique qu'une condamnation morale. Ainsi, on traînera éventuellement quelqu’un aux gémonies si l’on entend, par exemple, le traîner devant un tribunal.

Pour autant, faisons amende honorable : vous n’avez pas commis d’erreur au sens propre, disons juste une « imprécision » de langage.

J'ajoute qu'en fait de leçons données, vous n'êtes pas en reste et guère porté à l'autocritique.

C'était d'ailleurs bien le sens de cette observation d'une finesse toute relative, je vous l'accorde, mais qui disait bien ce qu'elle voulait dire...

Quant au courage de l'anonymat, je vous invite à réfléchir sur la possibilité que vous laissez à vos commentateurs de le conserver... Assumez les choix que vous offrez.

D'ailleurs, que vous apporterait de savoir qui je suis ?

Baygon Jaune a dit…

1. J'irai regarder dans le Littré à l'occasion, ça serait déjà un point positif que pourrait m'apporter votre réaction.

2. Pour ce qui est de mon auto-critique, elle se porte plutôt bien, merci.

3. En ce qui concerne les leçons données, à l'évidence ce blog est un défouloir ; pourquoi s'étonner ?

4. Et enfin, sur l'anonymat, c'est essentiellement relatif à la facilité de poster des messages. Je n'ai du reste pas effacé votre message, et y ai même répondu poliment me semble-t-il. Je ne fais que mentionner le fait que curieusement, les plus « agressifs » sont aussi généralement anonymes.

Anonyme a dit…

Je pense qu'il est important de
distinguer deux sortes de
croyances.
L'hypothèse (de travail), la confiance dans le travail d'un autre, la probabilité font partie
de la première catégorie. Cela
implique que la croyance puisse être vérifiée, confirmée à terme.
La croyance religieuse ou idéologique, exclut que l'on
ait la possibilité de la vérifier. C'est même ce qui la caractérise,
elle n'existe en tant que telle
(avec son contenu)que parce qu'elle est inaccessible à l'esprit humain.
D'où cette tendance à opposer
science et croyance.

Baygon Jaune a dit…

Et pourtant, la première catégorie est intrinsèquement dépendante d'une croyance de 2ème catégorié, à savoir une croyance profonde dans l'immuabilité des lois physiques, ie la constance de la réponse à une expérience donnée.

Je ne dis pas que cette croyance est irrationnelle ; je maintiens juste son statut de croyance.