lundi, mai 07, 2007

Je dénonce !

Préambule : ce qui suis n'a aucun rapport avec le résultat des élections ! Simplement j'avais plusieurs brouillons de posts, et je les poste par odre chronologique.

Je l'ai déjà dit ici même, je déteste la perte du sens des mots. L'évolution, soit, mais la perte pure et simple du sens d'un mot, voilà qui me fait rager.

Aujourd'hui : dénonciation et délation. Le premier terme n'est guère plus employé que dans le cas d'un artiste qui « ose dénoncer [mettre ici : les dangers de la téléphonie mobile ou des OGM, la fascisation de la France, l'engouement du vulgaire pour la musique commerciale] ». Une dénonciation, c'est à l'origine l'acte de rendre publique, officiel. Le sens que ce mot a perdu, c'est le sens de dénoncer à la justice.

Parce que maintenant, dans la langue courante, un tel acte est une délation, ce qui est un retournement de sens : une délation est une dénonciation, assorti d'un aspect négatif (dénonciation pour nuire ou pour son profit). Le français moyen a perdu de vue qu'une dénonciation pouvait ne pas être un acte négatif. Une dénonciation est pour lui forcément une délation, c'est un acte de « collabo » (là aussi, quelle perte de sens pour le terme collaborateur).

Alors bien sûr, si on demande à l'homme de la rue s'il dénoncerait un crime abominable, il dira que oui. Mais fondamentalement, ça lui coûte quand même. Il reste persuadé que les honnêtes gens ne devraient pas dénoncer qui que ce soit.

À tel point qu'il va apprendre à ses enfants que cafter, c'est mal. Laissons donc la loi du silence s'établir, encourageons les enfants à se faire justice eux-même quand ils sont jeunes ! Ça me sidérera toujours qu'on puisse tout à la fois :
- encourager ses enfants à ne pas être « un sale mouchard » ;
- conspuer tel voisin qui aura honnêtement appelé la police quand la loi était enfreinte ;
- et dans le même temps, râler contre la corruption, contre la mafia et l'omerta, etc.

De deux choses, l'une on souhaite vivre dans une société civilisée, où la loi républicaine prévaut, l'autre on souhaite vivre dans une non-société où c'est la loi du plus fort. Il faut être cohérent dans ses choix de vie, et par là même, dans l'utilisation de son vocabulaire.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Alors là je dis bravo, puisque dans mon passé enseignant j'ai du me bagarrer contre cette putain d'omerta qui règne dans les collèges - y compris les plus tranquilles - et qui est le paravent le plus confortable pour protéger les rackets, les bizutages immondes, le caïdat, voire bien plus grave (quand on apprend que la moitié ou presque d'un établissement savait qu'une môme était victime d'agressions sexuelles répétées...)

La dénonciation de crime est un devoir, et son contraire un délit.

Quant à la dénonciation des délits, elle ne relève elle que de la conscience individuelle. mais après avoir tenté de le faire renoncer, faut-il laisser partir un individu bourré à bloc au volant d'une grosse voiture sans aviser les autorités, sachant qu'il constitue un danger pour lui (c'est encore le moins grave) mais également pour les autres (ce serait "amusant" qu'il tue dix minutes après les deux gosses de la Grande Conscience qui s'est opposée, au nom des Principes, à ce qu'on avise les autorités...)

Personnellement, je ne dénoncerai jamais un délit ou un comportement qui n'implique pas une mise en danger de la vie ou de l'intégrité d'autrui. Je considère également comme immonde, si on a fait le choix citoyen de révéler un fait aux autorités, d'en tirer bénéfice direct ou indirect. Mais je ne ferai pas justice moi même contre un salopard de dealer qui tuera des gosses à petit feu, ou une ordure de maquereau qui tentera de mettre des gamines au tapin: en revanche, sans la moindre hésitation, j'aviserai les forces de l'ordre.